La réouverture du procès du 28 septembre en Guinée a été marquée par la prise de parole des avocats de la défense. Les uns après les autres, ils ont décidé de soulever plusieurs exceptions susceptibles, selon eux, d’annuler les poursuites contre leurs clients. Parmi les éléments de procédure mis en cause, il y a l’ordonnance de renvoi. Elle date de 2017. Certains des avocats pointent des irrégularités. D’autres encore, dont les clients ont passé plusieurs années en prison, dénoncent des détentions abusives. Face aux arguments des avocats parfois longuement développés, le président a montré plusieurs fois des signes d’agacement, demandant aux avocats d’aller droit au but pour soulever leurs exceptions.
Treize ans après les violences commises en 2009 au stade de Conakry, le public manifeste son engouement pour assister au procès historique de l’ancien président Moussa Dadis Camara et de 10 autres anciens responsables politiques et militaires. Le 28 septembre 2009 et les jours suivants, des soldats, des policiers et des miliciens avaient fait couler un bain de sang lors du rassemblement de sympathisants de l’opposition réunis dans un stade de Conakry pour démontrer pacifiquement leur force et dissuader Moussa Dadis Camara de se présenter à la présidentielle de janvier 2010. Selon une enquête mandatée par l’ONU, 156 personnes ont été tuées, au moins 109 femmes violées et des centaines de personnes blessées.
Au tribunal de Conakry lors de l’ouverture du procès, les 11 accusés, tous placés en détention provisoire, étaient présents. Aux côtés du principal d’entre eux, l’ex-président Moussa Dadis Camara, se trouvaient plusieurs hommes forts de son régime : son ancien chef de camp Toumba, l’ancien chef de la sécurité présidentielle Claude Pivi, l’ex-ministre de la Santé Abdoulaye Cherif Diaby, ou encore Moussa Tiegboro Camara chargé de la lutte contre le trafic de drogue.
Devant les parties civiles et les dizaines de caméras de télévision, les prévenus sont appelés les uns après les autres à la barre pour décliner leur identité. Lorsque vient le tour de Moussa Dadis Camara, plusieurs dizaines de personnes dans le public se lèvent spontanément comme un seul homme pour l’observer. Vêtu d’un boubou blanc, l’accusé se lève et s’avance lentement vers le pupitre en bois verni. D’une petite voix, il décline son identité, son adresse, sa profession… Le président lui rappelle les faits qui lui sont reprochés : coups, blessures et violence volontaire au stade, pillage de marchandise, incendie de magasins, enlèvement, torture, séquestration de manifestants…
Au nom du respect de la présomption d’innocence, les avocats de Moussa Dadis Camara et de ses dix co-accusés refusent que les médias enregistrent et filment leur procès. Une demande rejetée par le procureur, Ibrahima Sory Tounkara : « la Cour a autorisé la présence de caméras dans le prétoire pour nourrir la mémoire collective ».