Lundi 20 juin, c’est un sourire de façade qu’arborent les députés de la majorité. Victorieux, ils n’ont pas obtenu la majorité absolue à l’Assemblée nationale lors du second tour des élections législatives, dimanche 19 juin. À l’aube d’un mandat qui s’annonce difficile, ils sont bien moins nombreux qu’espéré. Trois ministres ont même été battus dans les urnes et devront démissionner. Il s’agit d’Amélie de Montchalin, Brigitte Bourguignon et Justine Benin. C’est un revers pour la majorité présidentielle, qui ne pourra plus gouverner seule.
89 sièges pour le Rassemblement national
De son côté, c’est une heureuse surprise qui est arrivée à Marine Le Pen. Son parti, le Rassemblement national (RN), opère la plus grande percée et décroche 89 sièges, bien au-delà des 15 députés nécessaires pour former un groupe à l’Assemblée. L’opposition est d’ores et déjà déterminée à peser, y compris à gauche. La Nupes a, elle, obtenu 133 sièges. Avec 74 députés, Les Républicains peuvent faire pencher la balance. Le gouvernement pourrait regarder de ce côté pour obtenir une majorité.
Possibilité de dissolution du Parlement
Loin de la majorité relative de Michel Rocard de 1988 (275 députés), qui était parvenue à faire voter ses textes grâce à l’appoint de députés centristes ou ultra-marins, quitte à recourir à l’article 49.3, la nouvelle majorité étriquée de la macronie devra rivaliser d’ingéniosité et de conviction pour espérer faire voter ses textes. À défaut, il reste à Emmanuel Macron une dernière arme, hautement risquée : la dissolution de l’Assemblée nationale, prérogative que lui garantit l’article 12 de la Constitution.
La Première Ministre en difficulté
Emmanuel Macron a perdu sa majorité absolue lors des élections législatives et sa Première ministre Élisabeth Borne est plus fragilisée que jamais. « Cette femme n’a aucune légitimité, zéro », a ainsi déclaré Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la Nupes, mardi 21 juin. Le même jour, Emmanuel Macron recevait à l’Élysée les dirigeants de partis, à commencer par celui des Républicains, Christian Jacob. Emmanuel Macron lui a demandé : « Y a-t-il une voie de passage avec Borne ? ». Un signe que la question du maintien de la Première ministre se pose.
L’alliance de gauche de la Nupes et le Rassemblement national surgissent en groupes d’opposition majeurs à l’Assemblée. Et Les Républicains et l’UDI cumulent 64 sièges, contre une centaine précédemment. Avec une abstention à 53,77% des inscrits. Il n’y aura pas de cohabitation en tant que telle mais « On entre dans une terre inconnue » d’après l’historien Nicolas Roussellier, avec une situation inédite et extrêmement compliquée à gérer à l’Assemblée. Le nouvel hémicycle comptant 37,3% de femmes, en recul par rapport à 2017 (39%).
Un remaniement du gouvernement en perspective
Quinze ministres étaient présents au second tour de ces élections législatives. Trois avaient terminé en deuxième position au premier tour. Et l’exécutif avait rappelé avant le scrutin la règle pour les ministres défaits. Édictée en 2017 par Emmanuel Macron, et héritée de Nicolas Sarkozy, elle établit que tout ministre battu dans une élection doit démissionner de ses fonctions. La Première ministre Élisabeth Borne a été élue de justesse dans le Calvados face au candidat de la Nupes Noé Gauchard avec 52,46% des suffrages exprimés. Un score extrêmement faible dans une circonscription qui lui était sur le papier largement favorable.
Mais Amélie de Montchalin, la ministre de la Transition écologique et proche d’Emmanuel Macron, est battue par Jérôme Guedj, candidat de la Nupes, dans l’Essonne. Brigitte Bourguignon, ministre de la Santé et sortante dans la sixième circonscription du Pas-de-Calais, battue par sa rivale RN Christine Engrand, devra aussi quitter le gouvernement. Idem pour la députée sortante de Guadeloupe et secrétaire d’État chargée de la mer Justine Bénin, face à Christian Baptiste, maire de Sainte-Anne et candidat de la Nupes, élu avec 58,65 % des suffrages.
Pour le reste, parmi les ministres victorieux figurent le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin dans le Nord, son collègue des Solidarités Damien Abad dans l’Ain, Olivier Dussopt (Travail), Franck Riester (Commerce extérieur), Marc Fesneau (Agriculture), Olivier Véran (Relations avec le Parlement), Yaël Braun-Pivet (Outre-mer) et Gabriel Attal (Comptes publics).
La porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire et ses collègues Stanislas Guerini (Fonction publique) et Clément Beaune (Europe) l’ont emporté à Paris après une bataille acharnée face à des candidats de la Nupes.