Les conclusions du nouveau rapport du Fonds monétaire international (FMI) consacré au Cameroun ont provoqué des secousses de fortes amplitudes à Yaoundé. Frappé de plein fouet par de multiples remous sociaux, dont l’interminable grève des enseignants, le rapport du FMI tombe mal pour Yaoundé.
Absence d’une traçabilité centralisée des engagements et des paiements du Fonds spécial, opacité des conditions d’attribution des contrats spéciaux, propices aux abus, et difficulté, pour les organes de contrôle, de collecter des informations comptables fiables, sont les principaux dysfonctionnements relevés par le FMI dans le rapport d’audit produit par Yaoundé le 16 novembre 2021.
L’institution financière internationale réclamait un audit indépendant sur la gestion des sommes allouées à la lutte contre la pandémie de COVID-19 avant toute conclusion d’un nouveau programme d’assistance économique destiné au pays de Paul Biya. Le 23 février 2022, en concluant les consultations de 2021 au titre de l’article IV et les premières revues des accords au titre de la facilité élargie de crédit et du mécanisme élargi de crédit en faveur du Cameroun, le conseil d’administration du FMI a décidé que le pays de Paul Biya recevra 65 milliards de F supplémentaires en décaissements. La mise à disponibilité de ces ressources est-elle désormais conditionnée à la production d’un nouveau rapport d’audit des fonds COVID ?
Sur instructions du président du président Paul Biya, la Chambre des comptes de la Cour suprême a audité le « Fonds spécial de solidarité nationale pour la lutte contre le coronavirus et ses répercussions économiques et sociales », créé le 3 juin 2020 et doté de 180 milliards F répartis en quatre programmes pilotés par 24 départements ministériels. Rendu le 16 novembre 2021, son rapport était tout simplement renversant.
Centré autour des activités conduites par le ministère de la Santé publique (Minsanté), le ministère de la Recherche scientifique et de l’Innovation (Minresi) et le ministère des Finances (Minfi), pendant l’exercice 2020, le rapport de la Chambre des comptes a démontré que les dépenses des autres départements ministériels jusqu’au 31 décembre 2020 au titre du Fonds spécial ont été peu significatives. Des 22 activités menées par le Minsanté, le Minfi, et le Minresi, l’auditeur a révélé que la dépense s’élève à 99,59 milliards F alors que les montants engagés caracolent à 157,9 milliards F !
Dans sa conclusion, la Chambre des comptes a formulé 30 recommandations. Conformément à la loi, elle a également décidé d’ouvrir quatorze procédures pour faute de gestion ainsi que une procédure pour gestion de fait, et de transmettre au ministre de la Justice douze dossiers susceptibles de revêtir une qualification pénale.