« Est et demeure pour compter de la date de signature de la présente décision, interdite sur l’ensemble de l’arrondissement de Yaoundé II, notamment à l’hôtel Massao, la cérémonie publique de mariage non déclarée prévue le vendredi 14 août 2020 par sieur Biloa Effa, officier du centre d’état civil secondaire de Messa Nkoaba’a en disgrâce », signe Mamadi Mahamat, le sous-préfet du deuxième arrondissement de Yaoundé, le 13 août 2020. Pour motiver sa décision, l’autorité administrative évoque : « défaut de déclaration de manifestation (cérémonie publique) ; défaut de qualité du secrétaire d’état civil, sieur Lewoua Valentin ; et défaut de publication de mariage ». Pour Mamadi Mahamat, « tout contrevenant aux dispositions de la décision s’expose aux sanctions prévues par la loi ».
La loi n°90/055 du 19 décembre 1990 fixant le régime des réunions et des manifestations publiques, en son article 6 stipule que : « sont soumis à. l’obligation de déclaration préalable, tous les cortèges, défilés, marches et rassemblements de personnes et, d’une manière générale, toutes les manifestations sur la voie publique ». D’autre part l’article 8 dispose : « le sous-préfet qui reçoit la déclaration en délivre immédiatement récépissé. Toutefois, s’il estime que la manifestation projetée est de nature à troubler gravement l’ordre public, il peut, le cas échéant : lui assigner un autre lieu ou un autre itinéraire ; interdire par arrêté qu’il notifie immédiatement au signataire de la déclaration au domicile élu ». En complément, l’article 231 du Code pénal dispose : « est puni d’un emprisonnement de quinze (15) jours à six (06) mois et d’une amende de cinq mille (5 000) à cent mille (100 000) francs. celui qui : participe à l’organisation d’une réunion publique qui n’a pas été préalablement déclarée ; fait une déclaration de nature à tromper les autorités sur les conditions ou l’objet de la réunion ; avant le dépôt de la déclaration ou après l’interdiction légale d’une manifestation, adresse, par quelque moyen que ce soit, une convocation pour y prendre part ; fait une déclaration incomplète ou inexacte de nature à tromper sur les conditions de la manifestation projetée. Est puni des peines prévues à l’alinéa 1 ci-dessus, l’organisateur de toute manifestation publique sans déclaration requise ou après notification de l’interdiction légale ».
Le mariage du porte-parole du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) avait-il été déclaré ? Le sous-préfet Mamadi Mahamat avait-il besoin de déployer toute l’artillerie observée autour de l’hôtel initialement prévu pour abriter ce mariage ? Pour L’ancien adjoint maire de la Commune de Yaoundé 6, Saint Eloi Bidoung, « lorsque le couple soumet son dossier, la mairie informe l’Etat et fait la publication de bans. Cette publication se fait 30 jours avant le mariage. Il arrive que cela se fasse à moins de 30 jours, mais le plus important est que ce préalable soit fait ». A la question de savoir si la mairie du deuxième arrondissement de Yaoundé a procédé à la publication de bans, la réponse est positive. Une publication dans ce sens barrait le babillard de l’Hôtel de ville de cette municipalité.
Le jour du mariage, « à l’attention de notre aimable clientèle, le mariage du 14/08/2020 à Massao Palace Hôtel est annulé », annonçait une affiche à l’entrée de l’hôtel quadrillé par des éléments de la Police et de la Gendarmerie. Le mariage a finalement été célébré en catimini. « M et Mme Bibou Nissack ce sont mariés ce 14 août 2020 entre 8H et 10H à la chefferie Messa Nkoaba’a. Le reste n’était que distraction », a réagi Nyëbë Edoa, un militant du MRC. « Nous sommes légalement mariés, sur une base inattaquable », a déclaré Bibou Nissack. Au final, plus de peur que de mal. Mamadi Mahamat, sous-préfet du deuxième arrondissement de Yaoundé voulait sans doute plaire à son patron, le ministre de l’administration territoriale, qui destitua Biloa Effa de ses fonctions de chef traditionnel de 3e degré, aux motifs d’insubordination, d’incitation à l’insurrection et de participation active à une manifestation politique non autorisé, le 6 décembre 2019.