Fin décembre 2022, le ministère des Affaires étrangères du Burkina Faso a demandé dans un courrier à son homologue français le remplacement de l’ambassadeur à Ouagadougou, Luc Hallade, en place depuis 2019. Dans cette lettre, qui a largement fuité sur les réseaux sociaux, les autorités burkinabè affirment que l’ambassadeur «ne serait plus un interlocuteur fiable». Une source française confirme l’existence de cet échange, en précisant que «la question de l’ambassadeur n’est pas au centre des préoccupations».
Si les autorités burkinabè ne détaillent pas, dans cette missive, les raisons qui ont motivé leur requête, plusieurs sources soutiennent qu’elles sont en partie liées à une lettre envoyée par Luc Hallade, ambassadeur de France au Burkina Faso, aux ressortissants français de Koudougou le 12 décembre 2022. Dans ce courrier qui a lui aussi fuité sur la Toile, l’ambassadeur invitait « avec insistance » ses compatriotes habitant cette ville, située à 100 kilomètres à l’ouest de Ouagadougou, à se « relocaliser » dans la capitale ou à Bobo-Dioulasso, dans le sud-ouest du pays.
Pour l’heure, le Burkina ne semble pas rompre ses liens diplomatiques avec la France. Le ministère burkinabè des Affaires étrangères demande plutôt à changer d’interlocuteur. Cette «expulsion» est plus soft peut-être que celle opérée par le Mali, mais elle n’en demeure pas moins un casus belli diplomatique. C’est une décision qui renvoie évidemment au souverainisme assumé, et à cette coupure du cordon ombilical avec la France que certains demandent à tue-tête, ce qui ne peut que plaire par les temps qui courent, car la France, c’est le bouc émissaire par essence de beaucoup de malheurs de la conscience burkinabè, savamment distillé par des activistes. Le Burkina est désormais dans une vision diplomatique du muscle et subtilement suit les pas du Mali, tout en évitant de faire exactement comme à Bamako. Toutefois, au Burkina comme au Mali, la menace terroriste est réelle.
La menace djihadiste ne cesse de progresser au Burkina Faso depuis 2015, au point que plus de 40 % du territoire échappe aujourd’hui au contrôle de l’État. Koudougou, troisième ville la plus peuplée du pays, « est passée en zone rouge [et donc formellement déconseillée aux Français par le Quai d’Orsay] depuis depuis le coup d’État du 30 septembre 2022 », précisait Luc Hallade, avant de souligner que « rester à Koudougou représentait un risque important ».