Inscrits depuis quelques mois dans le protocole thérapeutique pour patients positifs au nouveau coronavirus, à la suite d’une recommandation du Conseil scientifique, le président Paul Biya a ordonné la fabrication de comprimés de chloroquine et d’azithromycine. Le 6 août, au cours de la réunion de monitoring de la riposte du gouvernement contre la pandémie de COVID-19 présidée en vidéoconférence par le Premier ministre, Joseph Dion Ngute, Madeleine Tchuinté, le ministre de la Recherche scientifique et de l’Innovation (Minresi), annonçait la fabrication de 5 millions de comprimés de chloroquine et plus de 2,5 millions de comprimés d’azithromycine, par l’Institut de recherches médicales et d’études des plantes médicinales (IMPM). Si jusque-là tout semble normal, une immersion dans les mélangeur, granulateur, étuve à ventilation, et presse à comprimés de l’IMPM, permet de mieux appréhender le climat délétère entre cet organisme et sa tutelle qu’est le Minresi.
Depuis le 9 avril 2020, date du feu vert donné par le président de la République pour la fabrication de médicaments contre le COVID-19 sur le territoire camerounais, Jean-Louis Essame Oyono, le directeur de l’IMPM a toujours affirmé que, « ce n’est pas le personnel qualifié ni les équipements appropriés pour la fabrication du médicament qui manquent ». La volonté de ce virtuose s’est heurté au manque d’intrants nécessaires à la fabrication de médicaments. En raison d’une part, de son incapacité à acheter directement la matière première nécessaire à la fabrication de médicaments, et considérant que les grandes puissances avaient déjà acheté tous les stocks d’intrants auprès des fournisseurs, pour les revendre à des prix exorbitants, d’autre part, l’IMPM a informé le Minresi de l’impossibilité d’acquérir la fameuse matière première.
En lieu et place de cette matière première, et considérant l’urgence, l’IMPM a proposé au Minresi à qui une enveloppe de 4 milliards de F a été affectée pour l’opération, de commander la chloroquine et l’azithromycine avec les moyens disponibles. L’accord étant donné, l’IMPM a commandé les deux produits auprès d’une grande firme pharmaceutique en Inde. Les produits commandés sous la forme du vrac pour être conditionné au Cameroun, présentaient une double économie au niveau de leur coût, parce que pas totalement conditionnés, et de leur transport parce que livrés dans des sacs. L’autre avantage présenté par les produits commandés en Inde réside dans leur dosage. Ils sont à 200 mg, soit deux fois plus efficaces que ceux venus de Chine et utilisés jusque-là.
Les emballages, éléments pourtant accessoires, sont à l’origine du climat délétère qui règne actuellement entre le Minresi et l’IMPM sur un projet aussi sensible que celui de la fabrication de médicaments contre le COVID-19, ordonné par le président de la République. Sur la question, Madeleine Tchuinté soutient que les emballages des produits sensés avoir été fabriqués au Cameroun, doivent être fabriqués eux-aussi au Cameroun. L’IMPM, attiré par la faiblesse du coût, a opté pour la commande en Inde des emballages. Cette option, le Minresi n’en veut pas. Pour Madeleine Tchuinté, il n’est pas question que l’on sache que les produits ne sont pas entièrement fabriqués localement. Cette obstination du Minresi dissimulerait mal des relents de détournement des fonds alloués à la production des médicaments contre le COVID-19. Pourquoi ne pas laisser l’IMPM aller jusqu’au bout de sa logique et en dresser le bilan à la fin ? Parlant du Minresi, des voix ayant requis anonymat pensent qu’« elle doit pouvoir laisser l’IMPM, en tant qu’organe technique, faire son travail ». Alors que les malades du COVID-19 attendent, la cagnotte de 4 milliards de F allouée pour la fabrication des médicaments fait des vagues. Madeleine Tchuinté a déjà contre elle le déni de l’origine réelle des médicaments.